Séminaire sur les Perspectives de l’Energie Mondiale 2012
Date: 21 Décembre 2011
Venue: Ankara - Türkiye

Le Ministère des Affaires Etrangères de la République de la Turquie a organisé un séminaire, le 21 Décembre 2011, sur les Perspectives de l’Energie Mondiale (WEO) 2012, présenté par le Dr Fatih Birol, Economiste en Chef et Directeur de la Division de l'Analyse Economique de l'Agence Internationale de l’Energie (AIE) basée à Paris et Directeur des revues “Perspectives de l’Energie Mondiale”, une publication phare de l'Agence Internationale de l'Energie. Toutes les ambassades à Ankara, le Bureau du Coordonnateur Résident des Nations Unies et la Représentation de la Commission Européenne en Turquie ont été invités à ce séminaire. Le Dr. Jian Mardukhi a assisté à cette réunion au nom de SESRIC.

Le Dr. Birol a présenté un résumé des sujets importants abordés dans le WEO 2012, en commençant par souligner le fait que l'intérêt international et l'attention aux sujets liés à l'énergie sont en progrès constant et que l’énergie et la géopolitique sont devenus plus interconnectés que jamais. La présentation a été divisée en deux sections principales: la situation actuelle et le futur.

L'état actuel des questions clés dans le secteur de l'énergie mondiale a été mis en évidence comme suit:

  • Les récentes préoccupations économiques ont dévié les attentions des politiques énergétiques et ont limité les moyens d'intervention:
    • Les gouvernements détournent les fonds précédemment alloués à des projets énergétiques pour couvrir les déficits budgétaires, et,
    • En raison de la crise financière, les engagements politiques pris récemment par les Gouvernements en ce qui concerne les obligations de changements climatiques ont été placé en bas de la liste des priorités.
  • Après l'accident de Fukushima, l'énergie nucléaire est confrontée à l'incertitude et à des implications indirectes pour d'autres formes d'énergie.
  • Les turbulences au Moyen-Orient et en Afrique du Nord (MOAN) ont jeté des doutes quant aux investissements nécessaires dans cette région en ce qui concerne l’extraction de pétrole, comme 90% de la croissance de la production mondiale de pétrole de 2010 à 2035 doit provenir des pays du MOAN.
  • Certaines tendances principales vont dans des directions inquiétantes:
    • Les émissions de CO2 ont rebondi pour atteindre un niveau record en 2010, ce qui est une indication des variations entre les programmes des gouvernements face au changement climatique et la réalité de ce qui est mis en œuvre;
    • Accroître l'efficacité énergétique est une priorité absolue dans la politique énergétique de tout gouvernement et en général l'efficacité énergétique mondiale augmente d'environ 1%. Cependant durant les deux dernières années, l'efficacité énergétique de l'économie mondiale s'est aggravée;
    • Les dépenses d’importations de pétrole approchent à un grand record.

Le Dr. Birol a mis en avant les principales prévisions de l'AIE pour l'avenir de l'industrie mondiale de l'énergie comme suit:

  • La demande mondiale d'énergie augmentera d'un tiers au cours des années 2010 à 2035 avec la Chine et l'Inde qui représentant environ 50% de la croissance. Cela implique que les décisions vis à vis de l'énergie prise par Pékin ou Delhi peuvent déterminer les stratégies et politiques du reste des pays.
  • Les sources d'énergie renouvelables et de gaz naturel répondront ensemble à près des deux tiers de la demande d'énergie supplémentaire entre 2010 et 2035.
  • Les importations américaines de pétrole vont baisser en raison de la hausse de la production intérieure et l'amélioration de l'efficacité énergétique des transports. En conséquence, autour de 2015, les importations de l'Europe en pétrole dépasseront celles des États-Unis et d’ici 2020, la Chine deviendra le plus grand importateur de pétrole. Ces changements impliquent que le paysage de la sécurité internationale du pétrole va relativement se transformer puisque les États-Unis deviendront moins dépendants de l'importation de pétrole et l’augmentation des importations par l'Europe et la Chine induiront de nouvelles implications géopolitiques.
  • La région du MOAN fournira l'essentiel de la croissance de la production pétrolière en 2035, nécessitant des investissements de plus de $100 milliards par an. Les soulèvements politiques dans cette région ont toutefois transformé les mentalités au sujet du financement de l'industrie pétrolière dû également à la présence de besoins immédiats de financement pour de nombreux programmes sociaux et de développement. Cela implique que, dans un ‘Cas d'Investissement Différé - où des placements à court terme ne répondent pas aux montants nécessaires - la production du MOAN tombe à 3,4 millions de barils par jour d'ici 2015 et à 6,2 millions de barils par jour d'ici 2020. Les consommateurs font face à une augmentation à court terme des prix du pétrole, à 150 dollars le baril. Les producteurs de pétrole de la région du MOAN bénéficieront de plus de revenus provenant de l'exportation du pétrole au début, mais les recettes diminueront, car les régions perdront leur part de marché.
  • Le gaz naturel non conventionnel – les gisements de gaz naturel qui sont devenus accessibles grâce à l'avancement de la technologie et des connaissances géologiques et sont pour la plupart situés aux États-Unis, en Chine, au Canada, en Australie et en Inde –fournira 40% de l'augmentation de l'approvisionnement mondiale de 1,7 billions de mètre cube de 2010 à 2035, et donc par conséquent, «l'âge d'or du gaz naturel», mais les meilleures techniques sont indispensables pour réussir à relever les défis environnementaux.
  • Malgré son absence dans les discussions internationales, le charbon fourni presque la moitié de l'augmentation de la consommation mondiale d'énergie au cours de la dernière décennie, avec la plus grande partie de la croissance provenant du secteur de la production dans les économies émergentes. Cette tendance est très préoccupante dans la mesure où le changement climatique est affecté.
  • Après l'accident nucléaire de Fukushima, au Japon, de nombreux pays se sont interrogés sur la sécurité des centrales nucléaires et revoient et réduisent le nombre de centrales nucléaires dont la construction était prévue. Dans un ‘Cas Faible en Nucléaire’ - qui examine l'impact du nucléaire sur l'approvisionnement énergétique futur étant réduit de moitié - il y aurait une demande plus élevée pour les autres sources d'énergie comme le charbon, le gaz naturel, et les énergies renouvelables ce qui fait monter les prix. Pendant qu’une telle situation donne un coup de pouce aux sources d'énergie renouvelables, il est prévu que cela va augmenter probablement le coût de l'énergie, réduire la diversité de l'énergie, et rendre difficile la lutte contre le changement climatique.
  • Les subventions renouvelables de 66 milliards de dollars en 2010 (contre 409 milliards de dollars pour les combustibles fossiles), doivent atteindre les 250 milliards de dollars en 2035 étant donné que la hausse des coûts de déploiement l’emporte sur l’amélioration de la compétitivité. Ceci intervient lorsque la crise financière actuelle ne permet pas de telles augmentations des subventions.

Le Dr. Birol a exprimé sa préoccupation sur la supposition que les gouvernements tiennent leurs paroles concernant leurs obligations en matière de changement climatique et a également souligné le lien direct entre l'énergie et la pauvreté en indiquant que 1,3 milliard de personnes dans le monde vivent sans électricité. En conclusion, il a mis en avant les remarques finales:

  • Dans un monde plein d'incertitudes, une chose est certaine: la hausse des revenus et de la population vont augmenter les besoins énergétiques.
  • La diversité des offres de pétrole est en baisse, tandis que de nouvelles options s'ouvrent pour le gaz naturel.
  • Le Charbon - le carburant oublié - a soutenu la croissance, mais l'avenir sera façonné par l'apparition d’une technologie de charbon propre.
  • En dépit des mesures placées dans la bonne direction, notre angle d’attaque pour limiter l'augmentation de la température moyenne mondiale à 2°C diminue.